J’ai toujours aimé m’appuyer sur une œuvre littéraire. Pourquoi en inventer une, s’il y a beaucoup d’histoires merveilleuses dans la littérature ?
Après sa retraite de marin, Gades retourne sur le ring pour créer sa dernière œuvre. José Manuel Caballero Bonald lui avait déjà dit quinze ans plus tôt que le classique de Lope de Vega Fuenteovejuna s’adaptait parfaitement à ce qu’Antonio demandait au corps.
Après Bodas, Carmen et Fuego, flamencas et andalouses, avant de se retirer définitivement sur prescription médicale, il regarde en arrière, à ses années de jeunesse avec Pilar López et avec sa première compagnie avec la Jota, et il commence à composer Fuenteovejuna.
Il sait que la culture d’un peuple ne s’apprend pas, elle se partage, elle s’expérimente. Avec un scénario ébauché entre Antonio et Caballero, en juillet 1994, il commence à travailler. L’équipe est constituée d’Elvira Andrés répétitrice, Dominique You directeur technique, Juanjo Linares maître de folklore et Faustino Núñez, responsable de la musique.
Avec Fuenteovejuna Antonio sélectionne, parmi l’immense répertoire du folklore espagnol, des musiques et des chants qui illustrent le déroulement du drame. La partie illustrant les scènes du commandeur devait avoir principalement de la musique sur le mode de trompettes martiales. Pour Laurencia, Marina Claudio, le Maire Juan Quintero, le commandeur Candy Román. Des musiciens, les siens, à la guitarre, son ami Antonio Solera, Manuel Rodríguez (Perdi), et le chanteur Gómez de Jerez, Manolo Sevilla, Gabriel Cortés et son épouse, La Bronce, et Enrique Pantoja, bien sûr.
La bande son est basée sur des fondus de plus de trente genres musicaux différents, parvenant à l’unité et à l’efficacité théâtrale que seul Gades savait faire, en la dansant. Pour Fuenteovejuna le numéro préféré du public à la quasi-unanimité est Le Lavadero, le premier chorégraphié par Gades.
Le ballet est en cours d’achèvement mais il manque encore le début et la fin. Rien que cela. Le docteur José Luís Barros invite Pepe Caballero et Antonio dans sa maison d’Udra en Bueu, et Antonio vient également avec Faustino Núñez. C’est dans la maison du docteur Barros que Gades termine Fuenteovejuna.
La Compagnie Antonio Gades retourne sur le devant de la scène le 20 décembre 1994 au Carlo Felice de Gênes avec Fuenteovejuna, quatrième ballet et quatrième première à l’étranger (Bodas à Rome, Carmen et Fuego à Paris). Après la première de Gênes, avec grand succès, il commence une tournée au Japon et arrive, au mois d’avril, à la Maestranza de Séville et c’est la première en Espagne. La tournée sud-américaine de 1995 renouvelle son contact avec son continent bien-aimé. Brésil, Argentine, Uruguay et Chili ont vu Fuenteovejuna, et Cuba, une année plus tard (La Havane, Santiago et Guantánamo). Le 11 décembre 1995, il reçoit le Prix de Direction Chorégraphique de l’Association de Directeurs de Scène (ADE) pour Fuenteovejuna.
Au cours de ces années, il a commencé à forger l’idée de se consacrer à la formation, rêve qu’il n’a pas pu réaliser et que la Fondation entend récupérer.